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 EPE mai 2007

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Chris
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MessageSujet: EPE mai 2007   EPE mai 2007 EmptyLun 7 Mai 2007 - 18:13

Introduction :





Dans le cadre de ma formation d’éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse, une étude de pratique éducative m’est demandée.

J’ai longtemps hésité entre différentes situations que j’ai vécu dans l’établissement qui m’a accueilli durant ma première année de stage.

Entre le Challenge Michelet (manifestation sportive que j’ai encadré), différentes sorties ou crises, différents temps institutionnels forts comme la réunion de jeunes, et la situation que j’ai choisi.

L’événement retenu est ma première soirée au C.P.I de Metz. Une soirée comme celle-ci ne s’oublie pas, de surcroît quand c’est la première.
Et elle m’a aussi rapidement permis de m’imprégner de ce que demande comme investissement et comme posture professionnelle le fait d’être éducateur à la PJJ, en hébergement.

J’ai commencé la journée à 07h00, celle-ci devant s’achever à 22h00. Or je n’ai pu quitter le foyer qu’à 02h00 du matin, en raison d’un enchaînement d’événements qui nous ont maintenu au foyer.

Avant de faire partie de cette promotion d’éducateurs, j’ai travaillé six années durant en Maison d’arrêt, à Bois d’Arcy (78) puis au centre pénitentiaire de Metz.
J’ai travaillé en Quartier mineur, y exerçant la fonction de référent mineur. J’ai rapidement saisi que travailler en hébergement est très différent de ce que j’avais pu réaliser auparavant.
On doit faire plus et mieux, l’attente des jeunes n’étant évidemment pas la même non plus.

Je vais découper cette étude en trois parties.

La première consiste en la présentation du cadre, de l’endroit où j’ai effectué mon stage.

La deuxième partie comprend les jeunes et le déroulement de la situation.

Enfin, la troisième partie donnera l’analyse de la situation vécue.










I.Présentation du cadre


CENTRE DE PLACEMENT IMMEDIAT METZ SABLON


Le CPI de Metz est une des solutions d’hébergement existantes dans la nomenclature de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ). Ces centres sont destinés à accueillir des mineurs délinquants sur le fondement de l’ordonnance du 2 février 1945, éventuellement des mineurs en danger en application des articles 375 et suivants du code civil.

La protection judiciaire de la jeunesse est un service de l'Etat, Ministère de la Justice.
Sa mission est de donner les moyens nécessaires à la mise en œuvre des mesures prises par les magistrats à l'égard des mineurs et jeunes majeurs en difficulté en application des textes relatifs à l'enfance délinquante (ordonnance du 2 février 1945) et en danger (assistance éducative): mesures d'investigation, d'éducation en milieu ouvert, de placement en établissement, mesure de liberté surveillée, de réparation etc.
A ce titre, le CPI de Metz est un service déconcentré du ministère de la justice qui est sous l’autorité de la direction départementale de la PJJ Moselle, qui anime, coordonne et contrôle l'activité des services du département, et met en œuvre le schéma départemental de protection de l'enfance en relation avec le conseil général. Elle assure la liaison avec les autorités judiciaires du département.
Cette direction départementale est elle-même soumise aux directives d’une direction régionale qui, sous l'autorité du Garde des sceaux, ministre de la justice et dans le respect des attributions dévolues aux préfets de région et du département, est chargée dans la région pour ses principales missions :
- d'appliquer la politique nationale de prise en charge de la jeunesse délinquante et en danger.
- d'harmoniser les actions du secteur public et du secteur privé.
- de définir et d'évaluer les besoins de prise en charge de la jeunesse délinquante et en danger et de contribuer en liaison avec les autorités judiciaires et administratives, à l'élaboration et au suivi des actions conduites dans ce domaine.
- de répartir l'ensemble des moyens en personnel et en équipement.

Comme bien souvent, la création d’un nouveau mode de prise en charge vise la satisfaction d’une carence. En ce qui concerne les CPI, l’administration centrale de la PJJ part du constat suivant : il existe des difficultés à trouver un placement en urgence. A cela s’ajoute le souhait d’une meilleure gestion de l’accueil immédiat des mineurs.
Le CPI de Metz est donc créé en 1999.

VOCATION ET PARTICULARITE DU CPI DE METZ

Le CPI de Metz a pour vocation d’accueillir des mineurs délinquants sur le fondement de l’ordonnance du 2 février 1945, éventuellement des mineurs en danger en application des articles 375 et suivants du code civil. Cependant, il n’est pas destiné à prendre en charge l’intégralité des placements en urgence. Il est essentiel à cet égard que coexiste un dispositif d’accueil d’urgence départemental.
Le CPI est avant tout chargé de réaliser un travail d’évaluation et d’observation de la situation personnelle, familiale, scolaire ou professionnelle du mineur pendant un délai d’un à trois mois puis de proposer au magistrat une orientation.
Sa capacité d’accueil est de 12 mineurs maximum entre 13 et 18 ans. La qualité de la prise en charge individuelle et collective repose sur l’équilibre du groupe de mineurs, qui suppose de prendre en compte notamment l’écart des âges, le sexe et l’origine géographique.
Outre cette spécificité commune à tous les CPI, le centre de Metz a aussi la particularité de faire fonction de FAE . Cela permet une prise en charge plus longue, lorsque les trois premiers mois révolus, une prolongation s’avère nécessaire afin d’affiner la proposition d’orientation. Cette particularité permet la mise en œuvre d’une démarche plus individualisée en vue d’optimiser l’adaptation, l’intégration et l’insertion sociale ou professionnelle des jeunes mais aussi une approche plus approfondie de leurs problématiques.

ORGANISATION INTERNE ET OBJECTIFS

Objectifs du CPI

L’objectif principal du CPI est en grande partie déterminé par son cahier des charges : réaliser un travail d’évaluation et d’observation de la situation du mineur pendant un délai d’un à trois mois puis de proposer au magistrat une orientation.
Ce premier objectif, à l’instar d’une mesure d’Investigation et d’Orientation Educative (IOE) est une mesure d’aide à la décision pour le magistrat ; elle consiste en une démarche d’évaluation et d’analyse qui comprend les points suivants, à savoir le contexte sociologique, la personnalité du mineur et des membres de son environnement familial, le fonctionnement familial.

Le CPI doit prendre en compte et analyser le contexte du passage à l’acte de l’adolescent, la capacité du milieu familial à y faire face, son positionnement et celui du mineur par rapport à l’infraction et à ses conséquences.

A cela il faut ajouter, de par sa fonction de FAE, la mission d’élaboration d’un projet de réadaptation sociale. L’objectif est d’amener les jeunes vers l’autonomisation. Ce travail à long terme est d’autant plus facilité par les liens qui unissent le CPI à l’UEHD (même direction).

Pour atteindre ces objectifs, le CPI décline son activité en quatre principaux domaines.

1. Relation avec les familles

Le travail avec les familles demeure l’essentiel de la prise charge eu égard au fait qu’ils sont souvent à l’origine de la problématique du mineur et que ce dernier est appelé à y retourner. De fait l’équipe éducative encourage le maintien des contacts du jeune avec sa famille, tente de renouer des liens familiaux rompus ou distendus, et intervient dans la famille en l’aidant à acquérir une meilleure compréhension de leur situation pour leur permettre de mettre eux-mêmes en œuvre les solutions propres à résoudre leurs difficultés.

2. Projet individuel de prise en charge

L’équipe éducative est tenue de mettre par écrit un projet éducatif individualisé par jeune pris en charge. L’idée est de proposer un projet adapté à chaque jeune. Avant toute admission, un recueil d’information est effectué auprès du greffe du tribunal et si possible la situation du mineur est exposée par l’éducateur de milieu ouvert. Cela permet de déterminer les grands axes du travail éducatif à venir.
Avant le terme du placement, une synthèse est organisée avec à nouveau tous les acteurs dans la prise en charge du jeune afin d’émettre au juge des solutions d’orientation.

3. la réinsertion en milieu naturel

Dans ses objectifs, comme évoqué plus en amont, le CPI prévoit de faciliter, en milieu extérieur, l’intégration et l’adaptation sociales des jeunes. Cet objectif, qui prend en considération l’âge, le profil, l’intérêt et la capacité du jeune à s’assumer partiellement, se décline en deux modes essentiels :

- hébergement séquentiel (retour en famille), dans un cadre sécurisé (intervention du CPI en cas de difficulté).
- d’une manière générale, le recours au logement autonome, chambre ou appartement (UEHD), peut constituer l’étape qui prépare la fin de la prise en charge et l’accession à l’autonomie.
4.La prise en charge thérapeutique

Cette prise en charge thérapeutique découle soit d’une injonction thérapeutique ordonnée par un magistrat, soit de la demande de l’équipe éducative. Elle concerne les mineurs qui présentent une souffrance psychique exprimée par eux-mêmes, leur famille et/ou leur entourage. Mais elle englobe également, les jeunes qui cliniquement présentent des troubles du caractère et du comportement pouvant présenter un danger pour eux-mêmes ou pour les autres ou ressentis comme pénalisants dans leur intégration à une vie en collectivité.
Au sein du CPI, ce travail est coordonné par la psychologue dans une prise en charge pluridisciplinaire (éducateurs, infirmière). L’autre rôle de la psychologue est de relayer vers l’extérieur, notamment un travail en partenariat avec le dispositif CASA, des médecins psychiatres exerçant en cabinet sur Metz et l’hôpital psychiatrique de Jury.

Outre ces quatre domaines d’activité qui ne se veulent pas exhaustifs, il faut ajouter aussi la scolarité , la professionnalisation avec des partenaires tels que l’éducation nationale, la chambre du commerce et de l’industrie, le dispositif UEAJ, les classes relais………

Organisation interne

Le CPI est ouvert 24 heures sur 24 et 365 jours par an. Les horaires sont découpés en deux parties : le service du matin de 7 à 14 heures, le service de l’après midi de 13h30 à 22 heures ou 24 heures. Le service de nuit démarre à 21h30 heures pour finir à 7 heures, et est assuré par un personnel spécifique, les Agents Techniques d’Education (ATE).
Le temps du coucher est géré par un ATE avec l’aide d’un éducateur.
L’ensemble de l’équipe éducative se réunit une fois par semaine, le mardi, durant trois heures le matin et trois l’après-midi. Durant la matinée, chaque situation de jeune est évoquée, cela permet de faire le point sur les faits significatifs survenus dans la semaine et de prendre des décisions. Cette réunion a aussi pour intérêt une meilleure connaissance des jeunes et une uniformisation des réponses éducatives vis-à-vis des jeunes. Dans un deuxième temps, l’équipe évoque le déroulement de la réunion des jeunes ayant eu lieu la veille ; ce moment est aussi consacré à apporter une réponse aux demandes individuelles et collectives des jeunes.
L’après-midi est un temps beaucoup plus modulable, consacré aux questions de fonctionnement, aux synthèses, à l’analyse de la pratique,……

ORGANISATION HIERARCHIQUE ET ROLE DES DIFFERENTS ACTEURS DE L’INSTITUTION

Le personnel est composé d’un directeur, un chef de service, d’une secrétaire, neuf éducateurs, d’une psychologue, trois Agents Techniques d’Education, deux cuisiniers et d’une agent spécialiste, d’un ouvrier professionnel, une infirmière.
A cette liste, il faut aussi mentionner les différents stagiaires (IRTS et PJJ).

- Le directeur

Le Directeur met en œuvre un projet de service. Il a un rôle d'animation pédagogique et technique. Vis-à-vis des jeunes et de leur famille, il est garant de la loi et des règles, des droits et des devoirs, de la sécurité de chacun. Vis-à-vis des magistrats, il est garant de la prise en charge des mesures.Il représente aussi le service vis-à-vis des partenaires extérieurs. Il est enfin chargé de la fonction administrative et de gestion : il prépare le budget du service et l'exécute.

- Le chef de service

Par délégation de la direction, il anime, encadre l’équipe éducative et coordonne l’intervention éducative en interne et en externe avec les partenaires intervenant auprès des jeunes (services de l'ASE, scolaires, juges des enfants, clubs sportifs, maître d'apprentissage etc.). Il est responsable aussi du suivi du projet de service et des projets individualisés des jeunes accueillis.

- Les éducateurs

Les éducateurs sont chargés d'évaluer la situation sociale et professionnelle des jeunes qui leur sont confiés au CPI, afin de pouvoir proposer des solutions appropriées aux magistrats ; de mettre en œuvre les mesures éducatives et l'exécution des décisions de Justice prises à leur égard ; de les accompagner au quotidien; de reconstituer des liens entre le jeune, sa famille et la société ; d'élaborer, avec lui, son projet éducatif constituant de réelles perspectives de réinsertion sociale, scolaire et/ou professionnelle. L’essentiel de l'action éducative menée par les éducateurs se fait systématiquement en lien direct avec les familles, les magistrats et les enseignants.

- La psychologue

Elle rencontre si possible, à son arrivée, chaque jeune ainsi que ses parents. Par la suite, un travail peut être proposé sous forme d’entretiens réguliers. Les mineurs sont libres de la solliciter à tout moment.
La psychologue contribue par son expertise à une meilleure compréhension, par le juge des enfants et l’équipe éducative, de la personnalité des jeunes confiés au CPI. Elle participe à l’élaboration et au suivi des projets éducatifs qui les concernent. Cette forme d’intervention permet d’analyser les problématiques psychiques des mineurs, en apportant un éclairage éducatif et/ou thérapeutique.
La psychologue est en lien également avec des partenaires extérieurs (psychiatres et psychologues indépendants, services du secteur infanto-juvénile et les différents lieux d’accueil spécialisés).

- Les Agents Techniques d’éducation (ATE)

Ils assurent, principalement la nuit, la sécurité des personnes et des biens. Ils concourent, au sein des équipes éducatives à la continuité de l'action éducative.
Ils peuvent contribuer à l'animation d'activités menées au bénéfice de mineurs.

A ces personnels il faut associer une secrétaire (en charge de la partie administrative), une infirmière, et le personnel des services généraux (cuisine, entretien, etc.)


Dernière édition par le Lun 7 Mai 2007 - 18:16, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: EPE mai 2007   EPE mai 2007 EmptyLun 7 Mai 2007 - 18:14

II.Présentation et déroulement de la situation

1.Les jeunes

Irène :

Irène est née le 18 janvier 1992. Elle est placée au C.P.I depuis le 10 octobre 2006 dans le cadre de l’ordonnance du 02 février 1945 pour des faits de violences.
Irène connaît une période de crise permanente, ses passages à l’acte se multiplient et vont crescendo. A cela s’ajoute de nombreuses fugues et mises en danger. Elle fait plusieurs passages à l’hôpital et bénéficie d’un suivi psychologique appuyé.
Au niveau familial, elle souffre d’un manque évident d’amour maternel. Sa grand-mère tient également une place prépondérante dans la vie de la jeune fille, se substituant à la mère.Le père est absent.
Irène cherche absolument à tomber enceinte et dit en rêver. Elle dit souvent l’être mais refuse de faire un test.
Au niveau intellectuel, Irène a subi un test de Q.I. qui a montré les limites actuelles de celle-ci, son niveau se situant bien en deçà du niveau moyen de sa classe d’age.

Marie Elizabeth :

Marie Elizabeth est née le 15 décembre 1993. Elle est confiée au C.P.I. depuis le 15 novembre 2006 dans le cadre d’une assistance éducative.
Les parents sont séparés depuis trois ans. Elle a fait un bref séjour en foyer en début d’année, mais cela s’est mal passé et elle est retournée chez son père. Ses frères et sœurs sont eux restés avec la mère. Le père semble utiliser Marie Elizabeth pour obtenir de l’argent par les prestations sociales, et par la prostitution.
Elle n’est plus scolarisée depuis le CM2 et le divorce de ses parents. Elle semblait pourtant être bonne élève.
Elle a du caractère mais montre vite un problème de rapport à l’autre et de respect vis-à-vis d’elle-même inquiétant. Elle est prise aussi dans une relation troublante entre son père et un couple, qui l’amène à fréquenter celui-ci dans une relation ambiguë.

Mohamed:

Mohamed est né le 22 novembre 1991. Il est placé au C.P.I. dans le cadre de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à des faits de violences (agression sur un jeune lors des émeutes parisiennes). La victime est restée dans un coma artificiel et a subi des séquelles à l'agression.
Il vient de Mantes-la-Jolie. Le jeune n'est pas connu de la police avant ces faits. La mère est femme de ménage, et est profondément marquée par l’acte commis par son fils. Elle élève seule la fratrie de Mohamed. Le père a abandonné sa famille pour vivre au Maroc.
Mohamed est un garçon qui semble avoir compris la portée de l’acte commis et a une évolution très constructive suite à ce placement. Il est à l’écoute et est très curieux.




Drystan :

Drystan est né le 09 septembre 1990. Il est placé au C.P.I. dans le cadre de l’ordonnance du 02 février 1945 depuis 21 juin 2006 pour des faits de violences, et des agressions sexuelles envers sa sœur et sa mère.
Il a donc une sœur, Tristana. Sa mère et son père sont aujourd’hui séparés. Celle-ci souffre d’une sclérose en plaques à un stade très avancé de la maladie. Le père a la garde des enfants.
En 2003, Drystan est victime d’agressions sexuelles multiples, d’actes dégradants et violents de la part de quelques jeunes de son établissement scolaire.
En mai 2004, plainte de la mère contre son fils pour les agressions sexuelles de Drystan.
Il sera rapidement mis en situation de formation professionnelle et bénéficiera d’un suivi psychologique.

Edwin :

Edwin est né le 31 mai 1991. Il est placé au C.P.I. dans le cadre de l’ordonnance du 02 février 1945 depuis le 04 décembre 2006, pour vols et usage de stupéfiants. Il était placé auparavant dans un autre foyer mais ce fut un échec, Edwin multipliant les transgressions vis-à-vis de la consommation de produits stupéfiants et fuguant régulièrement.
Les parents d’Edwin sont séparés. Il vivait avec sa mère.
Edwin montre rapidement un comportement troublant vis-à-vis de la sexualité, multipliant les gestes obscènes. Il se pose tout de suite en situation de dominé dans le groupe.

2. La situation

Comme expliqué auparavant, une journée au CPI de Metz peut démarrer à 7h00 et finir à 22h00, voir bien plus tard si le coucher est difficile. On ne quitte la structure que si la situation est saine, pour ne pas laisser l’agent technique d’éducation dans une situation difficile.

Mercredi 06 décembre 2006. J’ai débuté ce jour là à 7h00. C’était encore les premiers jours de mon stage dans cet établissement. J’étais encadré par deux collègues, Gladys et Jean-Pierre. Les jeunes présents étaient Irène, Marie Elizabeth, Drystan, Mohamed et Edwin.

La journée débute bien, les jeunes se lèvent sans difficulté pour se mettre en situation d’activité. Je conduis Drystan à son stage, Mohamed se rend à l’école en bus. Les trois autres n’ont pas d’activité extérieure ce jour là.
Il est 9h00, les jeunes restants sont prêts à démarrer une nouvelle journée. On est tous les six dans le bureau des éducateurs et discutons. La matinée se passe bien, sans tension. Les parties de baby-foot et les discussions s’enchaînent. En fin de matinée, Irène montre quelques signes d’énervement. Par exemple elle veut absolument savoir ce qu’on fera le soir. Elle désire comme presque tous les jours se rendre dans un Bar Karaoké. Nous lui donnons comme réponse qu’on avisera en fonction du comportement de tous et après le retour des deux autres jeunes qui se trouvent à l’école et en stage.
Vers 11h50, Irène demande à passer un coup de téléphone à sa mère. Elle passe cet appel et demande à celle-ci si elle peut la recevoir ce week-end, ou tout du moins une journée. Elle semble refuser. Marie Elizabeth, qui était restée dans le bureau des éducateurs pendant l’appel, profite de la montée en tension d’Irène pour alimenter l’agressivité naissante de cette dernière, disant notamment : « Comment tu parles à ta mère, t’as pas honte, t’es vraiment une sale gosse… » . Irène se retourne et l’insulte copieusement tout en restant en ligne. On fait sortir Marie Elizabeth de la pièce, et je l’emmène en salle d’activités où se trouvent déjà Edwin et Gladys. De cette pièce on entend Irène s’en prendre de manière virulente à sa mère l’invectivant généreusement. Jean-Pierre décide de mettre fin à la communication. Ils nous rejoignent en salle d’activité.
Irène ne veut pas qu’on la reprenne sur ce qui vient de se passer et fuit toute discussion en s’emmurant dans un discours déraisonné et menaçant. Nous décidons de la laisser se calmer et discutons avec le reste du groupe, aussi pour permettre à celui-ci de ne pas rejoindre la cellule dans laquelle Irène venait de s’engouffrer.

Le déjeuner se passe calmement, rien de particulier à signaler, si ce n’est le retour de Mohamed qui a fini ses cours ce jour. Il y a bien quelques tensions au moment du nettoyage de la salle repas, mais sans plus.

Vers 13h15, après une discussion de groupe autour d’un café dans le bureau des éducateurs, le groupe de jeunes nous demande la permission de se rendre en ville pour se balader. Nous leur accordons cette sortie et leur demandons d’être de retour pour 18h30. Edwin reste et passe l’après-midi avec nous. On en profite pour faire un point avec lui et discutons à bâtons rompus. Nous sommes rejoints vers 17h00 par Drystan qui a fini sa journée de travail.

Vers 18h00, Marie Elizabeth est la première des trois à être de retour. Gladys est en salle d’activité avec les deux garçons.
Jean-pierre, qui est son référent au C.P.I. décide de faire le point avec elle et de revenir sur son comportement du matin par rapport à son ingérence dans l’appel d’Irène, mais aussi et surtout sur ses fugues répétées. Il fait un point aussi sur son évolution. J’assiste à l’entretien.
Au début, Marie Elizabeth discute volontiers, mais au fur et à mesure que l’éducateur énumère les choses à améliorer chez celle-ci, on sent son discours et sa posture changer.
Jean-Pierre lui fait remarquer qu’elle est encore très jeune et qu’il serait bon qu’elle cesse de fuguer, car elle se met en danger. De plus il lui demande également de faire un effort par rapport à sa tenue vestimentaire. Marie Elizabeth a treize ans mais a déjà un corps se rapprochant d’une adolescente de 16 ans. Elle en joue de manière provocante, multipliant les décolletés et les postures peu en rapport avec son âge. Il essaie de la raisonner et la prévient des risques qu’elle encourt par rapport à l’image qu’elle donne d’elle. Il la reprend également sur son hygiène qui est plus que limite. Il lui fait remarquer qu’elle doit absolument veiller à plus respecter son corps et elle-même.
Marie Elizabeth sait très bien qu’il a raison, mais au fur et à mesure que l’évidence du discours de Jean-Pierre la touche, elle met en scène un comportement ayant pour but de l’éloigner de nous. Elle nous provoque en adoptant une attitude désinvolte. Aux « je sais » du début de l’entretien se substituent des « et alors, qu’est ce que ça peut vous foutre » ou « je fais ce que je veux ». Elle finira par nous pousser à mettre fin à l’entretien en nous jetant dessus les rapports et notes se trouvant sur notre bureau, se moquant de nous de manière théâtrale en forçant un rire grossier.
Jean-Pierre la sort du bureau et met fin à l’entretien. Nous sommes déçus de cet entretien car elle a réussi à l’esquiver sans que nous puissions le rendre plus constructif.
Le repas du soir se déroule sans heurts. Irène parle beaucoup et pose de nombreuses questions. Elle dit être enceinte et interroge Gladys sur la maternité.
Nous nous retrouvons tous en salle d’activité. Drystan et Mohamed se posent en salle télévision, accompagnés par Gladys..
Jean-Pierre, Edwin, Marie Elizabeth et moi jouons au baby foot.

Irène s’asseoit dans un coin et écoute de la musique.Irène montre quelques signes d’agacement. Elle râle à voix basse. On interrompt la partie et je me tourne vers elle pour lui demander ce qui ne va pas. Elle me dit « vouloir sortir boire un verre ». Malheureusement pour elle, les autres jeunes ne veulent pas sortir ce soir-ci et il n’y a de surcroît pas d’argent disponible.
Irène s’emporte et m’insulte. Je la reprends mais elle monte d’un ton son agressivité, puis se rassied et s’excuse rapidement. Nous continuons notre partie et la laissons se calmer. Quelques minutes plus tard, elle se lève, et prends un morceau de verre dans la vitre qui était cassée. Celle-ci aurait du être changée mais ne l’était toujours pas au moment des faits.
Elle fait mine de se taillader le poignet.
Les autres jeunes se regroupent autour de la scène. Nous leur demandons de s’éloigner et de ne pas envenimer la situation. Gladys gère les garçons. Irène se rassied dans le coin de la pièce, le morceau de verre à la main. Jean-Pierre qui connaît bien la jeune fille sait qu’elle peut aller au bout de ses intentions. Il décide d’aller dans le bureau afin d’appeler le S.A.M.U. Gladys tente de raisonner Irène mais rien n’y fait.
Je demande à Irène si je peux m’asseoir à ses cotés car je sens bien qu’elle cherche avant tout à nous dire quelque chose. Elle accepte. Je lui parle du fait qu’elle se prétend enceinte. Je lui demande ce qu’elle ressent par rapport à ceci. Je ne mets pas en doute sa grossesse, je ne cherche pas à la contrarier. Nous discutons un bon quart d’heure, et elle répète inlassablement qu’elle en a marre, que « personne ne l’écoute ». Elle refuse néanmoins de me donner le morceau de verre. Je lui demande de réfléchir un peu par rapport à sa grossesse et tout ce que cela implique comme responsabilités. Je lui demande si elle a peur. Elle me dit que non. Elle me demande ensuite de la laisser seule. Je le lui accorde mais la préviens que le SAMU a été alerté et que je reste dans une zone où je peux la surveiller étant donné qu’elle ne veut pas se dessaisir du morceau de verre. Elle décide alors de me le donner.
Nous sommes soulagé mais maintenons la demande d’intervention du S.A.M.U.
Marie Elizabeth s’asseoit à coté d’Irène. Les deux filles discutent. Irène semble fatiguée, et très triste. Au bout d’un moment son visage se ferme. Elle se lève et se saisit à nouveau d’un morceau de verre, d’environ vingt centimètres de long.
Edwin, Mohamed et Drystan l’observent attentivement. Nous attendons avec impatience l’arrivée d’un médecin. Je dis à Irène qu’on ne peut plus continuer ainsi et qu’elle doit nous donner ce morceau de verre. Elle refuse évidemment. Je lui dis qu’après avoir passé un long moment à discuter avec elle, et qu’elle m’ait rendu l’objet d’elle-même la première fois, j’en attendais autant cette fois-ci. Elle m’insulte et dit « en avoir rien à foutre ».
Nous lui exprimons, mes collègues et moi-même, notre colère par rapport à ses invectives. Nous lui rappelons avoir été très patients avec elle. Après quoi elle rétorque que de toute façon, si elle « ne se tuait pas, elle planterait un éduc !». Nous lui faisons remarquer qu’elle va bien trop loin. Gladys appelle la police.
Je m’approche d’Irène, elle brandit alors son arme de fortune vers moi en disant que si j’approche pour la désarmer, elle me « plante ». Je réussi à la désarmer en l’attrapant au niveau du poignet. Un pression forte lui fait lâcher l’objet.
Elle est remontée mais ne dit rien. Cette situation semble avoir amusé Marie Elizabeth. Je dépose ensuite le bout de verre dans le bureau. Gladys et Jean-Pierre téléphonent tour à tour au SAMU, pour savoir quand quelqu’un interviendra..
Les filles profitent de notre relâchement logique suite à cette situation pour sauter par la fenêtre. Nous les déclarons aussitôt en fugue. Nous parlons de cet incident avec les trois garçons qui se disent en colère, qu’ « elles abusent », qu’ils les « auraient bien tartées ».
Vers 21h30, l’agent technique d’éducation nous rejoint. Les garçons, qui sont restés calmes et qui se sont posés en spectateurs tantôt indignés, tantôt amusés montent et rejoignent leurs chambres respectives.

Vers 22h00, nous entendons des bruits d’impact au niveau de la porte d’entrée. Nous nous rendons à la salle d’activité. Jean-Pierre ouvre la fenêtre pour ce qu’il se passe et évite de justesse un caillou qui lui frôle la tête et s’écrase contre le mur du fond de la salle. Gladys voit les deux filles et identifie Marie Elizabeth comme étant celle qui a lancé ce dernier caillou. Nous lui demandons de remonter à l’étage pour éviter que les garçons participent à cet incident. L’ A.T.E. rappelle la police.
Jean-Pierre et moi décidons de sortir du C.P.I., il voit les filles et tente de les rattraper. Au même moment arrive la police qui appréhende les deux jeunes, et nous les remet…Ils disent ne rien pouvoir faire étant donné qu’elles n’ont que 14 ans, si ce n’est attendre le lendemain pour porter plainte. Ce que nous ferons.
Les filles montent à l’étage et regagnent leur chambre. Il est presque minuit quand le médecin, ainsi que le SAMU arrivent enfin. Ils discutent avec Irène une bonne demi-heure, puis nous disent qu’elle va mieux, qu’on ne doit pas « s’inquiéter ».
Nous prenons acte de la décision et décidons d’accompagner l’A.T.E. encore un moment dans la nuit. Nous sommes épuisés. Après quelques tentatives de Marie Elizabeth de relancer la crise, et un épisode singulier, vers minuit un quart, où les garçons se lèvent alors qu’on les pensait assoupis, sortent de leur chambre en caleçon, à l’initiative d’Edwin, et débutent une bataille d’eau pour montrer qu’eux aussi existent, tous les jeunes finissent par dormir…
Il est deux heures du matin. Nous venons de passer une bonne heure assis par terre, dans le couloir, à nous ressourcer…
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MessageSujet: Re: EPE mai 2007   EPE mai 2007 EmptyLun 7 Mai 2007 - 18:15

III.Analyse de la situation



Ce fut une journée éprouvante dont je n’ai pas retrouvé l’intensité, lors du reste de mon stage.
Les épisodes d’agressivité ont laissé la place à une situation de violence et de passage à l’acte.

Irène souffre beaucoup du rejet familial dont elle est victime, Marie Elizabeth également. Toutes deux n’ont aucun repère paternel structurant. L’un est absent, l’autre destructeur. En outre elles ont toutes deux de grandes difficultés à s’exprimer clairement, pour l’une en raison d’un retard scolaire beaucoup trop important, pour l’autre d’un vocabulaire trop limité. Marie Elizabeth est élevée depuis le divorce de ses parents par son père qui a multiplié les séjours en prison et possède un vocabulaire et une culture peu riches qui n’a pas permis à sa fille d’assimiler suffisamment d’outils de communications pour exprimer son mal-être, autres que par l’agressivité, la fuite ou la violence.

Bernard Monnier, dans un article intitulé « un regard sur la violence des jeunes » aborde la notion de « Violences apparentes et Violences latentes ».

Les violences apparentes, sont celles qui ponctuent le quotidien de nombreux jeunes dans l'espace familial, celles que vivent les jeunes entre eux (bagarres, rackets...) ou qu'ils manifestent à l'extérieur (incivilités diverses, agressions, vandalisme, vols...).

Mais il aborde aussi et surtout la violence latente de leur vie habituelle: absence de rapport d'amour et d'exigence adultes/enfants et de relation éducative structurante; disparition ou ambiguïté des modèles d'identification (père au chômage, familles monoparentales, flou des références culturelles...), incompréhension ou rejet du milieu scolaire, impossibilité d'accéder à une formation et à un emploi, inexistence des lieux de loisirs, où ils peuvent faire des rencontres qu'ils puissent s'approprier pour expérimenter de nouveaux rapports sociaux, méfiance, rejet, voire agressivité des adultes à leur égard, suspicion permanente des forces de l'ordre, recherche de compensation par satisfaction immédiate et recherche des comportements répétitifs qui expriment leur dépendance: agressivité et violence, passivité, toxicomanie...» .
Irène veut sortir, et veut une réponse positive et rapide. Elle n’envisage pas d’autre réponse possible.Elle ne supporte plus d’être insatisfaite.
La violence qui se traduit par un passage à l’acte, exprime un mal être, c’est une information, un message que nous envoie son auteur.
Ces deux jeunes filles étaient victimes dans un tel rejet, qu’elles ne pouvaient, de surcroît, avoir la moindre estime d’elle-même.

Toutefois, toutes les violences ne se ressemblent pas.

Il y a d’abord la violence comme expression d’un mal-être ou d’une souffrance. Plus on est tenu intérieurement par une angoisse existentielle, moins on se montre capable de supporter les remarques venues de l’extérieur. Quand un adolescent vit toute la journée l’échec scolaire, quand il se sent en insécurité et qu’en outre, il ne possède pas les moyens de canaliser les pulsions qu’il ressent au fond de lui, l’acte violent peut alors devenir son seul moyen d’exister.
Une étude a été réalisée sur les liens entre le niveau de vocabulaire d’un sujet et l’intensité de sa violence. On a pu démontrer que sur les trois fonctions du langage (explicatif, performatif et émotif), c’est bien sur cette dernière dimension que les jeunes les plus violents étaient en difficulté. On peut le comprendre : comment, avec 400 mots de vocabulaire en moyenne, peut-on trouver du plaisir à partager ce que l’on ressent au fond de soi ? Ne reste plus alors que l’agression.
Quand Marie Elizabeth se sent jugée par Jean-Pierre durant l’entretien où il remet en cause sa manière d’être, et quand elle-même traite Irène de « sale gosse, comment tu oses parler à ta mère ? », on voit bien que les deux filles refusent d’être jugées. Elles montrent la seule chose qu’elles pensent maîtriser alors et qui leur permet d’exister. Elles fuient et cherchent à s’isoler, à s’échapper du regard de l’autre en le repoussant. Quand cette même Marie Elizabeth, toujours lors de cet entretien, répond par « je sais », « c’est vrai… », soit autant de réponses courtes qui n’apportent pas d’explications, c’est aussi car elle ne dispose pas de l’outil lui permettant d’exprimer son mal être, de mettre un mot sur ses maux.

Autre forme que peut prendre la violence : la tentative pour exister face aux autres. Le paradoxe des adolescents, c’est qu’ils ont besoin de l’adulte et qu’ils le vivent comme une menace. Ceux d’entre eux qui ont le plus de mal à mentaliser ce qui se passe en eux n’ont comme seul moyen que la violence dirigée vers ceux dont ils ont le plus besoin. C’est le moyen qu’ils ont trouvé pour se protéger et se rendre sourd à ce qu’ils ne veulent pas entendre. En même temps, c’est la meilleure manière pour attirer sur eux l’attention des adultes, ici des éducateurs.

Dernière modalité de la violence : le mode d’action, la stratégie pour peser sur le cours des événements, le procédé employé pour obtenir quelque chose par la force ou contraindre l’autre à se plier à son désir. Mais cette forme là de la violence vaut surtout pour les jeunes entre eux.


Il faut différencier aussi l’agressivité, qui est à l’opposé de la violence.

Brigitte MARTEL, Psychothérapeute en Gestalt, explique la différence entre agressivité et violence.

Le mot "agressivité", étymologiquement, vient de l'expression latine « ad-gressere », signifiant aller vers, ce qui est synonyme de contact.

L’étymologie de violence est « Violare », qui a pour sens agir de force sur quelqu’un ou quelque chose, et « violentus », abus de force.

L’étymologie nous renvoie donc à deux concepts bien différents : aller vers ou agir de force…
L’agressivité saine, reliée à la puissance de la personne et s’exprimant dans le respect du cadre, est nécessaire pour vivre.
Perls, le fondateur de la Gestalt-thérapie , lui a donné une place importante dans la croissance de la personne : pour lui, vivre et croître dans l’environnement nécessite de l'agresser pour pouvoir s'en nourrir. Il donne la métaphore de la nourriture : pour s'alimenter, l'homme doit agresser l'aliment, c'est-à-dire le mordre, le mâcher, afin de prendre les substances nécessaires à sa croissance.

Pour différencier violence et agressivité, Perls donne trois critères.

Le premier est l’existence d’un sentiment de puissance, d’impuissance ou de toute puissance.
L'impuissance et la toute-puissance sont du côté de la violence, alors que la puissance est du côté de l'agressivité.
Certaines violences, peuvent être associées à un vécu de surpuissance ou de toute-puissance, qui se résumerait par la phrase : "si je veux, je fais, que l'autre soit d'accord ou non".

D'autres violences s'expriment lorsque la personne vit l'impuissance : elle risque de frapper, de détruire car elle ne parvient pas à obtenir ce qu’elle veut, ou parce qu’elle est niée et qu’elle n’a plus rien à perdre. Dans ce cas, la motivation de l’acte violent est moins d’obtenir quelque chose que d’exprimer son dépit, son impuissance, voire sa rage.
Irène qui ne sait plus comment s’extirper de la situation qui s’est installée, n’a plus d’autre issue qu’un passage à l’acte.
Par contre, sentir sa puissance, c'est-à-dire ses capacités, permet d'aller vers l'autre, non pour le détruire, mais pour le rencontrer et pour exister en face de lui.
Un éducateur doit être porteur de cette puissance là.


Le deuxième critère de différence entre violence et agressivité concerne le comportement avec le cadre, à savoir l'ensemble des lois sociales ou les règles qui régissent les relations interpersonnelles. La violence s’accompagne toujours d’une sortie du cadre alors que l’agressivité peut s’exprimer dans le respect du cadre.

Le dernier critère porte sur la notion de contact.Alors que dans l'agressivité il y a conscience de l'existence de l'autre et rencontre de cet autre, la violence s'accompagne d'une rupture de la relation, l'autre devenant l'objet à détruire. Agressivité et violence sont donc deux forces opposées, la première menant vers le plein contact, la deuxième vers la rupture du contact.

Irène débute tout d’abord sa crise (mais aussi et surtout son message) par un acte symbolique fort. Pourquoi vouloir se taillader les veines ?

La conscience possède une stabilité qui s'oppose à l'existence du corps et à son état. C'est la volonté de faire ce que l'on décide et pas ce dont on a immédiatement envie (ceci n'est qu'une apparence, mais résulte d'un phénomène bien réel : la persistance du "sens sémantique" dans notre esprit, c’est à dire des symboles qui ordonnent et organise notre action en s'opposant à la pulsion qui découle de la réalité sensible).

Quelqu'un qui n'aurait plus le goût de la vie, qui n'aurait plus le goût du plaisir, et qui de part le sens qu'il donne à la réalité, n'a pas de solution possible à long terme, n'a pas d'avenir radieux à espérer, sait pourtant qu'il va vivre.

L'existence humaine a deux buts : éviter la souffrance et rechercher le plaisir.
Si la quête de plaisir apparaît comme à jamais impossible et irréalisable alors l'évitement de la souffrance n'a plus de valeur, car cette action même est déjà une souffrance si il n'y a pas de récompense.
C'est donc, dans cette optique, tout à fait normal de préférer éliminer la cause de la souffrance, l'existence à travers la forme qu'elle semble avoir prise.

La cause de la souffrance n'apparaît plus extérieure, puisque l'extérieur n'offre plus la possibilité de s'y opposer et devient une prison, mais intérieure, comme un handicap.
La prison étant inconsciente et donc interne (parce qu'en réalité, notre vision non symbolique des choses sait bien qu'on peut s'en sortir avec des efforts), on choisit de détruire la prison et on essaie de s’éliminer, on se suicide.

Il est plus facile de croire que rien n'ira jamais mieux....

Irène dit aussi être enceinte.
Comment comprendre ce besoin de devenir mère avant même d’avoir été femme ? Est-ce une tentative de conquérir un statut de mère qui pourrait la protéger ? Est-ce une manière détournée d’attaquer son corps, un besoin d’aimer et de protéger un être vulnérable, son bébé, là où elle-même n’a pas bénéficié de cette attention ? Qu’en est-il aussi du père ? Elle n’en parle pas. Peut-être recherche t-elle là son propre père ?
Sa soi-disant grossesse n’est-elle pas une manière d’avorter sa propre adolescence ? Autant de questions qui sont des pistes à explorer.

La fin de soirée et l’épisode des garçons est bien plus anecdotique. Ils voulaient simplement montrer qu’eux aussi existaient, et avoir le dernier mot.




















Conclusion :


Cette soirée si particulière pour moi, car la première, m’a permis de rapidement voir certaines difficultés du travail en hébergement, mais aussi ce qu’ont pu m’apporter ces années passées dans l’administration pénitentiaire, notamment en terme d’expérience face aux situations de crise, de faire la part des choses entre violence et agressivité, d’une certaine posture à adopter.

En hébergement, du fait du plus petit nombre de jeunes, de notre connaissance du vécu, de la personnalité de l’adolescent plus pointue, de notre mission différente, aussi, les enjeux sont autres.

En maison d’arrêt, les situations de crise doivent se résoudre rapidement. On n’a pas vraiment le temps d’analyser, de passer beaucoup de temps à discuter de la situation. On a trop peur des risques de propagation de l’incident aux autres détenus. Il faut aller vite.

Je n’étais donc pas expérimenté face à une telle demande, puisque les solutions dont je disposais avant étaient tout autres à la résolution de la crise. Pas moyen d’isoler la personne, de l’enfermer. Tant mieux.
J’ai été si souvent frustré de ce que je voyais, du fait qu’on ne pouvait se permettre d’écouter toute la souffrance de l’émetteur.

Cette situation m’a immergé rapidement dans cette nouvelle façon de travailler. Les deux collègues titulaires ont eu également l’intelligence de me mettre en avant tout en me soutenant, me surveillant, me guidant avec une discrétion remarquable.

Cette situation m’a permis de m’affirmer et de me positionner.

J’ai aussi compris la complexité et la fatigue qu’engendraient une telle prise en charge. Il faut être à la fois à l’écoute, vigilant, cadrant, et bien garder en tête la problématique de chacun. Mais aussi être capable de retranscrire l’événement à l’équipe éducative.
C’est un travail passionnant et très exigeant. Il faut faire le tri dans ses émotions, son ressenti propre pour en tirer une analyse objective et constructive.
Les jeunes nous poussent sans cesse dans nos retranchements, cherchant à connaître nos limites. Ils ont besoin de cadre et doivent tester la fiabilité de celui-ci.

La solidarité affichée dans un événement comme celui-ci, le fait que les jeunes aient vu que nous restions avec l’A.T.E. au-delà de notre temps de travail prévu, leur donne aussi une image forte de solidarité, d’entraide et de soutien. Ceci représente ce qui leur manque bien souvent, dans leur famille.
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MessageSujet: Re: EPE mai 2007   EPE mai 2007 EmptyJeu 7 Juin 2007 - 23:25

Bon ben demain je passe la soutenance de cet EPE... à 11h00.

Au passage merci de m'avoir pas lu lol!

Plus d'info demain soir
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MessageSujet: Re: EPE mai 2007   EPE mai 2007 EmptySam 9 Juin 2007 - 11:31

Alors les infos ?
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MessageSujet: Re: EPE mai 2007   EPE mai 2007 EmptySam 9 Juin 2007 - 21:18

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MessageSujet: Re: EPE mai 2007   EPE mai 2007 EmptyDim 10 Juin 2007 - 11:37

Désolée de pas avoir lu j'ai pas eu franchement le temps.

Félicitations pour ta note. Laughing
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